Histoire de Bellême

Selon certains historiens, le nom de Bellême pourrait être d’origine gauloise. La ville de Bellême tirerait son nom de Belisama, divinité gauloise identifiée à Minerve, déesse de l’intelligence. Le Perche, au temps de la Gaule, était cette région boisée difficile à pénétrer avec ses collines plantées d’arbres et ses vallées marécageuses.

Bellême, un éperon rocheux et une place fortifiée

Histoire de Bellême sièges
L’histoire de Bellême commence réellement au cours du Xe siècle. Yves de Creil, arbalétrier du roi, reçoit du souverain carolingien Louis IV la place de Bellême, ce lieu constituant un rempart pour contrer une avancée possible des Normands dans les territoires du Roi.
Un premier château est construit sur une motte artificielle en contre-bas de la ville actuelle. Dans son enceinte le premier seigneur de Bellême, Yves de Bellême, et son épouse fondent une église dédiée à Saint-Santin, édifice religieux qui est aujourd’hui une des plus anciennes églises du Perche. Au cours du XIe siècle, un nouveau château est reconstruit plus haut au sommet de la colline et cette seigneurie de Bellême va très vite devenir un centre de pouvoir extrêmement important. Si son premier seigneur était un homme sage et mesuré, ce n’est pas le cas de ses descendants, les Talvas, qui feront régner la terreur sur leurs territoires et ceux de leurs voisins.  Avec de tels seigneurs, guerriers dans l’âme, il ne faut donc pas s’étonner que la ville de Bellême, qui risque d’être attaquée à tout moment, se dote d’une architecture militaire pour devenir une belle place fortifiée.
Vers 1114, le Duc de Normandie, roi d’Angleterre, assisté du roi de France dépouillent le seigneur de Bellême, Robert le Diable, de son château de Bellême et abandonnent la seigneurie de Bellême à Rotrou III, comte du Perche, gendre du souverain anglais. Les bellêmois refusent ce traité. La lutte est terrible, la ville et le château sont pris. Après ce siège désastreux, la forteresse n’est plus que décombres et Rotrou III devra entreprendre de gros travaux de réparation.

En 1229 la lignée des Rotrou s’est éteinte et Blanche de Castille a des droits à exercer sur cette seigneurie. Bellême, grande forteresse du royaume, est qualifiée 
d’imprenable et possède l’un des plus beaux et majestueux donjons. La Régente, mère de Saint Louis, alors âgé de 9 ans,  décide de marcher sur Bellême à la tête de l’Ost royal. Le siège débute au début de l’hiver et la ville capitule en mars 1229.
Jusqu’en décembre 1449, fin de la guerre de Cent ans, la ville souffrira beaucoup de la domination anglaise.
Au cours des guerres de religion, de nombreux lieux de culte catholique seront pillés et saccagés par les protestants, nombreux dans la région. En 1589, à la mort du roi Henri III, la Ligue prend le château de Bellême, mais la majorité des nobles percherons sont hostiles à la Ligue. Pierre de Fontenay regroupera les seigneurs sous une même bannière pour libérer la ville. Il est nommé capitaine de Bellême, charge qu’il occupe jusqu’à sa mort le 18 mai 1610.

Jusqu’au XVIe siècle  Bellême est considérée comme la capitale du Perche grâce à cette forteresse qui a résisté à de multiples attaques. Les États généraux du Perche y furent convoqués en 1588, 1614 et 1789. Le clergé, la noblesse et le Tiers État y élisent leurs députés, et y rédigent leurs cahiers de doléances. Bellême est alors le siège de l’administration royale où nobles et bourgeois se font construire des hôtels particuliers.

L’activité économique au fil des siècles

Bellême Plan de Bellesme en 1744Au Moyen Âge, la seigneurie de Bellême s’étendait sur un territoire très vaste et discontinu, traversé de larges vallées qui constituaient autant d’axes de communication entre la Normandie et les pays de la Loire. Les marchandises transitaient sur ces axes et les seigneurs de Bellême en ont tiré grand profit en prélevant taxes et péages, sans compter les tonlieux. Les seigneurs de Bellême tiraient leur puissance de leur situation de « Portiers » de la Normandie. Ils contrôlaient les voies d’accès du Mans à Rouen et à Caen. Bellême se situait aussi sur la Voie Royale qui reliait Paris à Nantes en passant par le Mans et qui a été très active jusqu’au XIIIe siècle puis à nouveau au XVe siècle. Pendant très longtemps, il y eut un passage constant de voyageurs et de marchandises dans la ville, ce qui a généré une activité intense. Sous l’ancien régime,  la ville est le siège d’un bailliage, d’une maîtrise des Eaux et Forêts, et d’un grenier à sel. Tous ces corps de métiers y siègent et occupent des hôtels particuliers qui contribuent à la richesse du patrimoine architectural. Bellême a aussi connu une activité textile de renom, particulièrement florissante aux XVIIe et XVIIIe siècles, elle était  réputée pour ses étamines de qualité (environ 800 pièces par an), ses fils de coton, ses siamoises, ses mouchoirs, ses nappes et ses serviettes ouvrées. On comptait environ 80 métiers à tisser avant la Révolution, mais, au début du XIXe siècle, la production ne sut pas devenir industrielle et il n’y eut plus aucun métier en activité.

L’ancien grenier à sel de Bellême avant la Révolution

Porche Bellême salle du pilierSous l’ancien régime, on n’achète le sel que dans les greniers à sel où un officier du Roi, le « grenetier », le délivre en percevant un impôt appelé la gabelle qui représente 80 % de son prix de vente. Chaque percheron, même le plus pauvre d’entre eux, doit se procurer du sel car cette denrée était autrefois indispensable à la conservation des viandes. L’administration des Gabelles était divisée en directions générales, divisées elle-mêmes en greniers à sel. La province du Perche comprenait les greniers de Mortagne et de Bellême, qui relevaient de la direction d’Alençon, et le grenier de Nogent le Rotrou de celle du Mans. Le Perche était un pays de forte gabelle, c’est-à-dire taxé au plus fort. A côté de cette distribution officielle, il existait une contrebande active dirigée par les « gabelous ». Le sel était toujours stocké loin de l’humidité et de la lumière. L’ancienne salle des gardes d’une des deux portes de la ville close de Bellême était propice à sa conservation et servit de magasin jusqu’à la Révolution. Le bailliage, lieu où se situe aujourd’hui la mairie, accueillait un tribunal pour juger les délits relatifs à sa vente. A côté du personnel vendant le sel au détail, les « regrattiers », chaque grenier avait un président, un « grenetier », un contrôleur, un procureur du Roi et un greffier. Ces cinq charges étaient vénales et recherchées par les bourgeois de la ville de Bellême car elles permettaient souvent de s’élever dans la hiérarchie sociale. De nombreuses familles nobles et bourgeoises françaises ont souvent à l’origine un ancien officier au grenier à sel . Aucun impôt n’a été aussi détesté que la gabelle et il fut supprimé à la Révolution à la demande des français. Le grenier à sel de Bellême allait connaître une nouvelle destinée pendant plus de deux siècles avant de redevenir un lieu public où l’on ne vend plus du sel mais où l’on peut admirer des expositions de toutes sortes.

“Grenier à sel 12 novembre 1582 = sieur de la Beauloyère travaux par Michel et Michel Lucas. Une porte en pierre de
taille avec 2 piliers de pierre de taille au deux bouts du devant du pignon. Bail pour 9 ans, maison de dépôt du sel et deux greniers à sel au dessus servant à emplacer les sels pour la fourniture ordinaire … par la veuve Jean Petigars, sieur de la Garenne, … à Jacques Forseuille adjudicataire général des gabelles de France accepté par Jacques François de Muys conseiller du Roi receveur des gabelles à Bellême pour 250 livres, 2 minots de sel Cession du bas du boulevard étant à la porte de la ville close joignant les fossés de la paroisse saint Pierre à prendre entre les 2 portes pour 10 écus le 24 octobre 1581.